… ou comment perdre une journée pour deux centimètres et demi de cartilage ….
Cette journée de printemps a pourtant si bien commencée! Le devis du gentil électronicien est devenu, sinon raisonnable, tout du moins acceptable. Une visite à notre nouvelle « copine », vendeuse au magasin Uship, se solde par une facture inférieure à 10 euros. Et enfin un « petit blanc » en apéro dans un bar du port viens couronner cette matinée idyllique …
… c’était sans compter le coup du sort … et le plat du jour de la cantine que nous choisissons pour conclure la matinée. Truite saumonée aux oignons et poivrons accompagné d’une purée de cèleri (si si, j’en mange, enfin, plutôt, j’en mangeais).
Nous ne le répéterons jamais assez, il ne faut pas se jeter sur le plus gros morceau de poisson comme la pauvreté sur le monde. Sans précautions, sans prévenir, d’un coup d’un seul, paf l’Arête. Et pour me donner le compte, la voilà qui au lieu de gentiment glisser décide de se coincer dans un recoin mal cartographié de ma gorge. Bon, je finis quand même de déjeuner car en plus d’avoir un plat excellent, je ne vais pas me laisser faire par une « petite » contrariété.
Malheureusement, la réalité rattrape vite l’audacieux qui a cru pouvoir l’ignorer, et avant la fin du repas, la gêne provoquée entraine quelques complications dont je tairai la teneur.
D’audacieux, je deviens forcené et nous opérons un repli stratégique au bateau avec l’intention (pas vraiment avouée à Manue) d’extirper manu-militari l’encombrante arête à l’aide d’une pince fine qui traine dans la caisse à outils. Il est heureux que Manue soit avec moi pour quand même m’obliger à « stériliser » l’outil.
Toutefois, la méthode brute échoue lamentablement. Et internet nous « enseigne » les bonnes méthodes : engouffrer à la limite de l’étouffement autant de mie de pain que possible. En fait je respire toujours, mais je suis écœuré par la mie de pain quand Manue est auto-envoyée en mission « banane ». Car oui, il y a des gens pour qui la banane fonctionne bien mieux que le pain…
La mission « banane » est sans aucun doute un grand moment de la journée, car acheter deux bananes dans un magasin fermé au prétexte « d’urgence médicale » (terme employé par le vendeur), j’aurai aimé être là.
Finalement, les bananes sont tout aussi inefficaces que le pain, et le gentil électronicien, qui est passé chercher son chèque d’acompte, nous raconte que c’est arrivé à sa fille et que les médecins renvoient systématiquement vers les urgences pour ces cas. Nous décidons alors d’y aller directement, espérant, pauvres naïfs que nous sommes, que la chose peut être réglée en quelques minutes.
Arrivé, ou plutôt inscrits à 14h50, nous serons livrés à nous même jusque 17h, 2 heures au cours desquelles nous apprenons que faire un scanner aux urgences prends une journée complète, décision est donc prise de refuser le scanner, des fois que ce soit une méthode ultime de recherche d’arête.
Admis à 17h, je suis quand même étonné d’être « brancardiser » pour une vilaine arête, mais bon, ça va, ma tension est bonne … Quand au brancard, je le quitte presque aussi vite pour une chaise roulante, car la place est comptée … Je profite de cette demi-heure, trônant fièrement sur ma chaise à roulette au centre du service d’urgence, pour observer. De temps en temps, mon cas ressort dans les discussions, c’est là que mon surnon est trouvé « le monsieur qui a l’arête », identification qui dévie parfois en « c’est vous qui avez l’arête ? », « ben, oui, c’est moi qui ai l’arête ! ».
Heureusement, a 17h30 (ne rigolez pas, c’est long une demi heure à constater successivement dévouement et anéantissement dans les yeux des mêmes soignants). Direction, la consultation ORL, qui à compter de 18h prends 10 minutes chronos. Il aurait pu être plus rapide, mais parait-il que j’ai un énorme niveau de stress (fallait voire sa pince géante). Abaisse langue, pince géante, œil unique et lumineux au centre du front, le cyclope retire en un seul tour de main la cause de cette après midi perdue.
Merci docteur, ça va beaucoup mieux maintenant.
De retour au navire, la chair soignée, reste à s’occuper du spirituel, ou plutôt du spiritueux. Et au calme, avec un doux verre de rosé, je me souviens de la mine étonnée du médecin à l’annonce de la « truite saumonée », renseignements pris, il semble qu’il n’y ai pas d’arête dans ce poisson …