Le voyage de Takoumi

Saison 3

Archive mensuelles: mars 2018

Sur la plage Coco

La réussite de notre ultime halte aux San Blas est due à l’improbable enchaînement des événements, de nos choix et de beaucoup de chance.

Nous choisissons donc de nous arrêter à l’abri d’un récif du nom de Coco Banderas et les instructions nautiques désignent un lagon cerné par des îles semi-habitées comme « plus joli mouillage des San Blas ».

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Hélas, parvenus à l’endroit indiqué, les lieux se révèlent difficiles d’accès avec d’étroits chenaux sillonnant entre les bancs de coraux. Les îles semblent un peu plus habitées que nous l’espérions et quelques catamarans occupent déjà la place. En général, nous aurions fait fi de ces menus désagréments pour nous installer crânement au point qui nous semble le plus confortable. Mais aujourd’hui, la configuration générale du mouillage ne nous plait guère et nous préférons reporter notre dévolu sur un mouillage plus à l’ouest du récif … qui se révèle finalement bien plus à notre goût et qui mérite amplement le titre de «plus joli mouillage des San Blas … que nous connaissons».

Ceci dit, nous avons bien malgré nous pris plus de risques que ne l’aurait exigé le choix précédent pour atteindre le mouillage. Ce dernier se situe entre l’île « Orduptarboat » et deux énormes bancs de coraux affleurants qu’il convient de contourner par l’est. Mais à cet endroit, le manque de fiabilité de nos cartes électroniques (bien 500 mètres de décalage quand même) nous oblige à avancer dans ce havre à l’aide de nos seules observations. Du coup, persuadés de contourner les fameux écueils, nous passons un haut fond à deux mètre cinquante parsemé de grosses roches menaçantes.
Nous en sommes quitte pour un grand moment de solitude quand nous avançons sans savoir si la profondeur sera toujours suffisante, échaudés par le fait que le matin même nous avions touché sur un bien plus confortable banc de sable à la sortie des Holandes Cayes !
Finalement, après avoir pénétré le lagon sans encombre et jeté l’ancre nous nous retournons pour étudier sereinement la situation et constatons honteusement que nous sommes en fait passé … entre les deux bancs !

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Mais la magie du lieu valait bien cette sueur froide. Pas un seul autre voilier à l’horizon, quelques îles pas ou très faiblement habitées, immense reef pour protéger tout ceci et bien entendu, nos deux fameux bancs de coraux que nous allons visiter derechef avec masques et tubas.

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Ce sont les plus beaux fonds que nous verrons aux San Blas. Ici, quelques variétés de coraux atteignent des tailles très respectables, abritent des poissons multicolores et égayent les roches de leur couleur orangée.
Par contre, toujours pas d’observation de Langoustes sauvages. Cette quête inassouvie reste l’une des meilleures occasions de rire avec les deux pêcheurs de l’île qui nous assurent pourtant avoir pêché celles qu’ils nous apportent à peine à un mètre de profondeur.

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Ce sera d’ailleurs une belle expérience de rencontre avec les kunas des îles éparses. Comme nous rendons visite aux femmes de la famille restées sur l’île, nous consommerons une bière fraîche en leur compagnie et aurons le plaisir d’échanger une véritable conversation.
C’est ainsi que nous apprenons que les îles semi-habitées sont en fait des réserves de cocos (la base de leur économie) que des familles sont chargées d’entretenir par la communauté en général pour une période de quelques mois.

Notre programme pour compléter notre séjour près d’Orduptarboat se compose à partir de là du très classique triptyque « repos, promenades aquatiques et exploration des autres îles proches » : Nous ne nous en lassons pas, mais la recherche des langoustes ne porte toujours pas ses fruits.

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Le jour de notre départ, nous avons la visite surprise des pêcheurs de l’ile qui nous demandent de recharger leurs téléphones portables, smartphones et enceintes bluetooth à notre bord. Nous sommes heureux de leur rendre ce service qui semble si improbable en ces lieux abandonnés des technologies et de l’information, cela malgré les nouveaux signes de faiblesse de nos batteries…

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C’est donc repus d’aventure, de découvertes et de rencontres que nous quittons les San Blas pour Carthagène, en Colombie.

Flâneries aux San Blas

Les quelques jours suivants sont une succession de mouillages idylliques entourés de récifs et de plages paradisiaques.
Nous profitons de nos observations quotidiennes pour établir une typologie primaire des îles des San Blas : Une île vierge est une plage avec autant de cocotiers qu’il est possible d’y trouver ; une île semi-habitée ne comprend que trois ou quatre huttes et une centaine de cocotiers entretenus ; et enfin, une île habitée n’héberge qu’une poignée de cocotiers survivants clairsemés au milieu d’autant de huttes qu’il est possible d’y entasser.
De loin, l’ensemble représente un décor mérité de carte postale qui fait le bonheur des documentaires culturels et des catalogues de tour-opérateurs.

De près, les pieds au sec, il existe quand même un réel problème de détritus assez déconcertant. Pas comme sur les côtes du continent, là bas, ce sont leurs propres déchets qui s’érigent en monticules. Ici, nous soupçonnons plutôt les courants et vents de la mer caraïbe de charrier jusque sur ces plages paradisiaques les rejets des îles antillaises, du Venezuela et de la voisine Colombie … même s’il est évident aussi que le progrès rattrape bien assez vite les infortunés kunas.

Aux Lemon Keys, nous mouillons en compagnie d’autres voiliers dans un lagon entouré d’îles dont l’une héberge un « hôtel – camping – pension » de « luxe ». Nous entendons par « luxe » quelques bungalows sur pilotis et un restaurant-cantine où nous ferons l’erreur de nous inviter pour un soir. Découvrant que l’essore-touriste commence à avoir lieu ici aussi.

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Heureusement, le lagon est calme et la visite des îles environnantes est un plaisant moment d’exploration.

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À l’opposé, Gunboat Isla est un autre lagon où le reef émerge très très peu. Et où nous passons une nuit isolée, à l’exception de la visite de pêcheurs kunas à qui nous achetons une langouste qu’ils sont allés pêcher pour nous, sous nos yeux incrédules. L’absence de navigateurs ici protège les fonds et nous entreprenons notre première vraie exploration aquatique de la saison avec ce reef vivant et habité bien que nous ne parvenions pas à dénicher les langoustes qui, nous en avons la certitude, sillonnent ces parages à seulement quelques mètres de profondeur.

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La navigation depuis Gunboat Isla nous réserve la joie rare de voir un bébé dauphin accompagné de sa maman nageant quelques instants de conserve avec Takoumi. Un moment magique tellement le petit mammifère est mignon.

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Retour parmi les navigateurs pour l’étape suivante. Hollandes Keys et le mouillage de la Swimming-pool, à l’abri de l’île Barbecue, est l’un des mouillages les plus connus de la région. En fait, l’île s’appelle Morodup, mais l’industrie touristique manque de respect pour les lieux qu’elle colonise. Heureusement, l’affluence est plutôt calme ces jours-ci et notre témérité à nous avancer loin dans le mouillage nous accorde une place de choix à l’abri du troupeau. Nous y restons deux nuits, pour vraiment profiter des différentes îles à découvrir dans cet archipel foisonnant.

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Morodup est très bien entretenue, mais l’accueil laisse à désirer. Nous tournons les talons dès l’absence de réponse à nos salutations et quelques mètres avant le panneau « visite de l’île, 3$ ». Autant s’appeler « île Barbecue » finalement …

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Heureusement, sur Tiadup, à l’extrémité sud du mouillage, les habitants nous accueillent les bras ouverts et sont fiers de nous présenter leur pêche (encore des langoustes) et leur artisanat (encore des molas) … et pour finir, nous invitent à découvrir leur île et les quelques secrets qu’elle recèle avec le sourire.

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Nous reprenons notre chemin dès le lendemain pour une dernière et merveilleuse étape aux San Blas.

Visite chez les Kunas

Islas Carti est un regroupement de quatre îles habitées qui nous a été conseillées par le représentant de l’autorité maritime de Marina Linton lui-même Kuna quand nous sommes allés faire établir notre Zarpe de départ du Panama. Nous y arrivons le jour de la célébration de la révolution kuna, à l’issue de laquelle ils ont obtenu une grande autonomie et repoussé l’ingérence du gouvernement Panaméen.

Nous avions bien vu des photos, mais découvrir pour de vrai ces villages est assez impressionnant : nous sommes face à des îles habitées où résistent 3 ou 4 cocotiers au milieu d’un village de cases en bambou serrées comme des sardines et qui finalement recouvrent toute la place disponible … et même un peu plus

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Désireux de profiter au mieux de la fête, nous attendons la fin d’après-midi pour nous rendre non pas sur l’île en face la plus touristique, mais sur Tupilé qui se cache derrière à la recherche d’une expérience plus véritable qu’une brochette d’échoppes de produits artisanaux.
Accueillis par des jeunes kunas et un militaire tous très sympathiques, nous apprenons que nous avons manqué la célébration qui ne se tient que l’après-midi jusqu’à 16h … et que de toute façon, ils ne célèbrent pas la révolution sur Tupilé : Il faut se rendre sur la première île pour ça … Nous sommes assez déçus de l’infortune dont nous sommes seuls responsables. Toutefois, notre guide nous apprend qu’il y aura bien des danses et des chants ce soir, mais pour une autre raison et derechef, il nous conduit à travers le village jusqu’à la « cantina del pueblo », une immense hutte commune où se tient pour l’instant la fête de la chicha, un alcool à base de maïs. En chemin un vieux du village nous interpelle pour nous rappeler les règles … Hommes et femmes séparés, chacun disposant de son entrée et interdiction de prendre des photos. Ce qui explique que quelques images illustrant ces articles ne sont pas pour une fois toutes de nous.

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En chemin, Manue a le temps de surprendre une scène où un kuna probablement ivre mort est porté par ses comparses jusqu’à sa case ; nous avons de la chance, c’est l’un des trois jours de la semaine où le chef du village, le « Sahila», autorise la consommation d’alcool.

Arrivés à la cantina, grand espace sombre faiblement éclairé par un feu empli de groupes éparses, nous sommes donc séparés et dirigés chacun vers les zones appropriées.
C’est ainsi que Manue est assise à l’autre bout de la hutte entourée de femmes kunas qui rient, boivent et fument et dont l’une, Doris, a été nommée par ses pairs pour s’occuper de Manuela.

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De mon côté de la hutte, je n’en mène pas large privé de l’officier des communications, traducteur et presque diplomate du Takoumi. Contre toute attente, je m’en sors pas trop mal et j’échappe à un gentil garçon bourré comme un coing en discutant, en espagnol s’il vous plaît, avec mon voisin dont la discussion et les explications me mettent déjà beaucoup plus à l’aise … même si une phrase sur deux passe à la trappe.

J’apprends donc entre autres choses que le groupe de femmes à ma droite se préparent pour la cérémonie, c’est bon signe, qui débutera à la tombée de la nuit … là, c’est tout de suite plus compliqué dans la mesure où le crépuscule est encore loin et que je ne m’imagine pas attendre deux heures planté sur ma chaise que le spectacle commence. Je fait comprendre par de grands signes à Manuela que nous nous retrouvons dehors pour discuter et décidons d’utiliser ces deux heures pour visiter le village et dénicher une bière pour étancher notre soif.

During the Inna-Suit celebration three woman serve an alcoholic brew to the guests. The person in the middle is the initiated girl, her body is painted in black and a red scarf is covering her head. During the celebration she is not allowed to take of her scarf and show her face. There are only about 1200 Tule people left in Colombia. They are one of the 34 Tribes in danger of extinction. Due their location in the Darien Gap near the boarder of Panama the Tule people have suffered threads from both the leftist Guerilla and the right wing paramilitary. A lot of families have left the community and moved to Panama, where most of the Tule (in Panama Kuna) people live nowadays.

Au cours de notre ballade, nous croisons une foule de gens sympathiques presque tous disposés à engager la conversation avec nous et des enfants partout qui tiennent à nous montrer qu’il savent faire le poirier .. J’hésite à me joindre à eux et me ravise, ça fait 35 ans que j’ai plus fait ce genre de choses.

Quelques instants plus tard, boisson en main sur le « muelle » du village, nous assistons à l’arrivée du pêcheur local pour vendre ses bonites 1 dollar pièce. Petit à petit en cheminant vers la cantina, nous croisons tout le village équipé de sacs qui vont acheter du poisson en courant. Quand je dis tout le monde, je ne doit pas être bien loin de là vérité, il n’y a que 45 familles sur cette île (ou 45 adultes, ou 45 habitants … Nous n’avons pas encore tranché … mais pour le chiffre 45, nous sommes sûr :-).

Dans le même temps, je vois une gamine balayer les rues en terre … cela m’interpelle dans la mesure où c’est bien la première fois que je vois quelqu’un au Panama nettoyer plutôt que de jeter des détritus … peut-être le pays y gagnerait-il à être géré par les kunas.

Avant de retourner dans la cantina, nous apprenons que la fête de ce soir est la célébration de la puberté d’une jeune fille, événement qui ici est l’occasion d’une grande fête commune. Curieusement, apprendre ça renforce chez moi un sentiment de gêne déjà présent à l’idée de ce que je ressens être du voyeurisme au sein de l’intimité de leur communauté.

De retour à la cantina, il n’y a plus grand monde, si ce n’est les chefs de l’ile les » Sahiles » qui entament une lente danse/chant/musique tribale que nous écoutons avant de repartir. Nous n’attendons pas la nuit, pour une première incursion dans ce monde étrange et si éloigné de notre quotidien, nous préférons nous éclipser avant que l’obscurité ne recouvre ce village de son voile protecteur. Attitude respectueuse, saluée par une troupe de dauphins qui viennent nous rendre visite au crépuscule.

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La rencontre des San Blas

Partir vers de nouvelles contrées inexplorées nous met d’excellente humeur, à l’aube, impatients de reprendre enfin la mer, le voyage, l’expédition et la découverte … Takoumi vogue à fière allure, 5 nœuds en moyenne à revers des alizés grâce à sa carène fraîchement repeinte. Nous arrivons à Chichime, l’une des premières îles à l’ouest des îles San Blas localement appelées «Guna Yala». Cet archipel de plus de 360 iles au Panamá est un territoire autonome, habité et régi par une communauté d’indigènes nommés les « Gunas » prononcé Kunas. Ce sont eux qui font la réputation de ce bout de mer protégé par de grandes barrières de corail et des bancs de sable à perte de vue jusqu’à la frontière Colombienne.

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À notre arrivée nous entrons dans une carte postale et profitons enfin de pouvoir nous jeter à l’eau dès l’ancre posée au cœur d’un mouillage presque paradisiaque: sable fin, lagon, cocotiers – mais pas d’habitants Kunas et de très nombreux voiliers encombrant une anse finalement très étroite… Ainsi Olivier et moi ne nous ruons pas à terre cette fois, heureux de retrouver le calme des eaux turquoises et notre intimité à bord du bateau.

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Sans même gonfler notre récente et irréprochable annexe, nous repartirons dès le lendemain rejoindre les îles Carti au sud, villages habités cette fois, où se tient la fête annuelle de la commémoration de la révolution des Kunas de 1925. Ce peuple profondément pacifique s’était alors battu contre les autorités Panaméennes afin de faire respecter leur culture tribale et matriarcale, ce qui leur valût leur autonomie – non sans mal et avec un petit coup de pouce des Américains paraît-il…
La route vers les îles Carti se fait au portant en quelques heures que nous trouvons très confortables…après tant de navigation au près plutôt serré! D’ailleurs, nous passerons la semaine qui vient à zigzaguer d’îles en îles , alternant le près et le portant tout en progressant confortablement vers l’est et la Colombie, notre prochaine destination.

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Pour l’heure, en arrivant devant las islas Carti, nous n’avons pas le temps de jeter l’ancre que nous sommes abordés par une habitante vendant ces fameux « Molas » – que nous ne connaissons pas.

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Les Molas sont des sculptures uniques sur tissu, très colorées, en deux rectangles portés en tunique par les femmes Kunas que je trouve magnifiques.

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En attendant…abordés…nous le sommes littéralement quand ce petit bout de femme arrive, à la rame dans son « ulu », canoë minuscule ou « dugout canoe » en anglais, qu’elle enjambe notre plage arrière, passe sous la bôme d’artimon et s’affale dans notre carré !

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Malheureusement, ce premier contact nous laissera indécis suite à l’insistance plaintive et agressive de notre « hôte » . Nous jouons le jeu en lui achetant notre premier mola -que nous trouvons cher-et payons le bracelet qu’elle s’est empressée d’entourer autour de ma cheville. Celui-ci servira d’anecdote lors de nos prochaines rencontres et me vaudra quelques moqueries tant l’œuvre était ridiculement insignifiante pour les élégantes Kunas dont les bras et les mollets en sont entièrement décorés!

Islas Carti :

Redécouvrir un endroit

Je ne sais plus comment j’avais décrit la Marina Linton à notre dernier passage, mais, pour en dresser un portrait rapide, disons, 3 pontons de bonne facture devant un terre-plein avec un travel-lift flambant neuf et une station service minimaliste. D’horribles sanitaires prennent place dans un container qui fait écho à un mini-entrepôt d’accastillage. Un autre container tient lieu de bureau « provisoire qui dure » et un bâtiment en construction perpétuelle servira d’accueil … un jour.
En ce moment, le bâtiment inachevé est investi par les plaisanciers qui ont installés des bancs en plastique dans ses étages pour profiter le plus confortablement possible de l’inefficace connexion internet.
En dehors de ça et du petit monde grouillant qui lui donne vie, il n’y a rien d’autre … même le sympathique bar flottant a passé la main à la désolation après avoir épuisé 3 entrepreneurs ces 6 derniers mois.
Autant dire que si nous avions êtes dépressifs, il en aurait été fini de notre réserve de kleenex. Heureusement, nous ne nous chauffons pas de ce bois là et occupons agréablement nos 15 jours de purgatoire par de multiples promenades et découvertes.

Au premier titre de notre plan anti-sinistrose : faire la fête. Notre bonne fortune ayant programmé une soirée à Panamarina le lendemain de notre appontement, nous nous y rendons en compagnie de Pierrick que nous entraînons au fallacieux prétexte qu’il a une bonne annexe et nous une bonne lampe. Nous comprenons juste assez tard qu’il s’agit d’une soirée costumée pour éviter un accoutrement bariolé qui affuble les autres participants. Enfin … presque, Pierrick se déguisant in-extremis en improbable « Vahiné blonde » avec les moyens du bord mis à disposition par Nico. Toujours est-il que le groupe de musique est excellent pour l’un de ses premiers engagements et nous profitons de l’ambiance jusque tard dans la nuit.

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Second axe de développement personnel, nous entreprenons de découvrir la culture locale au travers des danses rituelles qui animent cette période de carnaval et c’est Pierrick, accompagné de sa charmante amie colombienne Solangel, qui cette fois nous entraîne jusqu’à « Cacique », le village voisin.
Solangel est peintre sur chaussures, colombienne et installée à Panama City d’où elle diffuse ses œuvres uniques. (mot clé : «solangelsus»).
Ceci dit, commander un taxi pour une heure précise n’a rien d’évident ici, et à l’heure dite, ce dernier devait cuver un lac de bière assoupi quelque part, car nous ne l’avons pas vu venir … Pour résoudre notre souci de transport, nous entreprenons une incursion au centre du village de Puerto Lindo à la nuit tombée et y découvrons un monde ahurissant … Les rues en terre sont remplies des habitants du village dans un maelström de musique, de street food et de bière … Les familles rassemblées devant chez eux et des électrons libres allant de groupe en groupe. Une folie au sein de laquelle nous trouvons enfin un taxi (un cousin du premier, mais moins aviné) disposé à nous emmener à Cacique.

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Cacique est un village important d’une région où l’influence africaine, nous l’apprenons à cette occasion, est particulièrement importante. De fait, l’ambiance, la musique et les danses nous transportent à des milliers de kilomètres d’ici, dans un lieu hors du temps que nous imaginions réservé aux villages du continent originel.

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La « danse du diable » est anecdotique et déstructurée en début de soirée, mais laisse la place à l’expression populaire de la séduction au rythme syncopé des tam-tams ancestraux. Et des plus jeunes aux plus vieux, tout le monde participe aux chants et aux danses sous la tonnelle du village, bien que nous remarquons que si les jeunes hommes et jeunes femmes se prêtent volontiers au jeu rituel, ce sont bien les anciens qui mènent le bal et pour les plus alertes d’entre eux, les tam-tams.


Nous quittons finalement le village en milieu de soirée, alors que la fête traditionnelle va se poursuivre jusqu’au plus profond de la nuit et que les rues en terre ne sont encore recouvertes qu’à moitié par les cannettes vides.

Le troisième acte du plan de sauvegarde de notre équilibre demeure nos folles expéditions. Si dans un premier temps nous visitons les bras de mer de la mangrove environnante, nous allons bien vite un peu plus loin … et surtout plus haut.

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À l’apogée de cette expédition, le phare Gustave Eiffel de la « Isla Grande », île balnéaire locale que nous prenons soin d’aborder un jour de semaine afin d’éviter la foule. Notre matinée, avant de trouver l’unique restaurant ouvert de l’île se compose donc d’un trajet en taxi, d’une traversée en Lancha (barque locale) et d’un trek pédestre jusqu’au plus haut point de l’île où trône le fameux phare dans son habit de rouille et de peinture écaillée.

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À ce moment là, une folle poussée de témérité nous pousse à pénétrer l’enceinte du phare et à entreprendre l’ascension du fier mais branlant édifice. Cette action aventureuse est immédiatement récompensée par une vue magnifique et imprenable sur tout l’horizon dont nous profitons quelques instants avant que les mouvements du phare induits par les fluctuations du vent ne nous encouragent à redescendre illico-presto.

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Pour le reste, le village de Isla Grande présente un peu d’intérêt par le fait qu’il est principalement touristique, et est donc un peu plus « urbanisé » que les villages du continent. Avec de nombreuses maisons prêtes à accueillir touristes et promeneurs. Et surtout, semble-t-il, enfin, un balbutiement de collecte de déchets.

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Après un déjeuner sur l’ile, nous repartons pour le continent, non sans avoir immortalisé par une photo le ponton que nous trouvons fort emblématique du Panama.

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Hormis toutes ces activités externes, les abords de la Marina ne manquent pas de nous pourvoir en occupations. Comme la partie de pêche où Manuela part seule en annexe et revient en ayant perdue sa ligne et ses crevettes-leurres magiques dans une manœuvre hasardeuse. Si effectivement les crevettes sont perdues corps et bien, nous retrouverons le fil de pêche deux jours plus tard dans l’hélice du moteur hors-bord qui tout d’un coup libéré marchera tout de suite mieux.
À l’occasion d’une lutte acharnée de votre serviteur avec nos infâmes batteries lourdes comme 4 ânes morts, Manuela, encore elle, lance l’activité « coconut » avec l’aide des deux diablotins des voisins. Ces derniers ne s’arrêteront pas à participer à l’ouverture des deux noix de coco de Manuela, mais irons en recueillir près d’une dizaine au grand dam de leurs mère, qui fera quand même bonne figure en encadrant deux jours durant ces deux enfants terribles dans ce qui restera connu comme « l’activité Coconut » ! Pas de panique, inutile de fermer vos volets, ces deux troublions ne reviendront pas de sitôt en Europe, leur parents ayant décidé de s’installer à Medellin en Colombie plutôt que de retrouver la Belgique flamande qui les a vus naître.

Une autre belle promenade nous mène également sur la isla Linton, territoire des singes que nous n’avions encore jamais osés aborder.

 

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Le reste de nos activités est somme toute assez classique, bricolages inégalement efficaces, achat de légumes aux nombreux vendeurs ambulants et point d’orgues, la réalisation de notre panneau « Amel for Sale » qui aura la charge de prévenir les promeneurs de pontons floridiens que Takoumi est à vendre.

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Nous avons aussi plaisir à discuter avec notre voisin « Alex » américain et propriétaire « par hasard » d’un magnifique outremer 55 ultralight dont nous le soupçonnons de préférer organiser les réparations plutôt que de réellement naviguer. Accompagné de Sergio, un jeune colombien ex-sous-marinier d’un calme et d’une sérénité désarmantes et véritable navigateur du navire, ils décident d’embarquer pour la Colombie autant de jeunes backpackers qu’il leur est possible. Nous les retrouverons plus tard aux San Blas et en Colombie.

Quand enfin, nous sommes prêts à partir pour les renommées îles San Blas, il ne nous restera finalement que quelques jours d’attente avant que les conditions de mer nous semblent suffisamment confortables pour affronter la remontée du vent et surtout des vagues jusqu’aux Îles San Blas.

Revenir sur ses traces

Quand nous quittons enfin Shelter Bay (ou Shelter Pay, c’est selon), notre premier arrêt ne nous est pas inconnu car nous retournons à Puerto Lindo et Isla Linton. Là même où nous avions atterris à notre arrivée des Îles Caïmans.

Non pas que le triptyque Marina Linton, Puerto Lindo et Panamarina soit incontournable, mais c’est une escale où nous avons quelques souvenirs plutôt agréables, à une demie journée de navigation côtière … Ce qui pour notre retour aux « affaires maritimes » nous convient parfaitement.

Bien que nous remontions vent et vagues, nous sommes très satisfaits de notre mise en « jambes ». La journée est belle et nous remontons à la voile sur plus de la moitié du chemin.

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Revenir sur ses pas, l’endroit fusse-t-il anecdotique, c’est aussi retrouver ses marques et ses repères. Un sentiment agréable de confort et de sécurité que nous avons rarement ressenti au cours de notre périple qui jusqu’ici se présentait comme une route à sens unique.

Nous retrouvons donc le mouillage de Puerto Lindo, un poil plus encombré qu’à la mauvaise saison. Mais aussi la « Casa X », le restaurant de Hans et son fils Martin. Rien n’a vraiment bougé en 6 mois, pas même les chauves souris qui continuent de prendre racines sous le drapeau Brésilien.

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Le restaurant français de Panamarina, tenu par Nico, reste un lieu de « gastronomie populaire » tout à fait recommandable. Pour certains, le « jour de la vache » hebdomadaire y est une institution qu’un garçon boucher ne renierait pas.

Sans surprise, la Marina Linton, reste une zone en chantier triste et sans autre intérêt qu’une connexion internet souffreteuse.

Las, point de ciel sans nuages au Panama, et à notre premier réveil, nous découvrons incrédules notre première avanie de la saison … batteries de service « à plat de chez à plat » … moins de 11 volts. Comme un coup de semonce qui annonce des ennuis et … des frais.

Heureusement, qui dit région familière dit aussi contacts … et nous retrouvons illico presto Pierrick, l’électricien français du mouillage, que nous avions rencontré à notre arrivée. Les batteries héritent du verdict « pas si mal que ça » voire « pas mauvaises du tout ». Le circuit de charge par contre n’inspire que suspicions.

Trois jours plus tard, sans diagnostic, nous sommes contraints de prendre la direction de l’austère marina pour pouvoir recharger, travailler à quai et dormir à plat … le mouillage est vraiment trop inconfortable avec la houle insistante.

Comme l’adage que j’ai entendu il n’y a pas si longtemps, les « emmerdes volent toujours en escadrilles » et le mauvais temps qui s’annonce nous immobilise 15 jours au port en terrain connu.

Nous en profiterons, souvent avec l’aide de Pierrick, devenu un bon copain, pour découvrir, un peu plus loin des terres inconnues.