Le voyage de Takoumi

Saison 3

Archive mensuelles: juin 2016

Scandales aux Antilles, les « Takoumi papers » ou « International liming » à Deshaies.

Précédemment dans « St-Kitts & Nevis, Monserrat », vous avez découvert que l’équipage de Takoumi avait oublié les papiers du bateau sur une île au nord de la Guadeloupe … à Nevis.
Ces documents sont importants car ils sont nécessaires pour toutes les fameuses formalités et je n’ose pas imaginer les tracasseries si tu ne peux justifier de la propriété de ton navire en cas de contrôle …

Bon, nous n’étions pas démunis, car nous avons imprimé, au mouillage, une copie provenant d’un très mauvais scan, pour assurer le coup au cas où. D’ailleurs, qu’est-ce que cela consomme comme électricité ! Aux premiers essais d’impression, refus et black out de l’imprimante : « inverter » (transformateur 12 vers 220 volts) en surcharge … Pas mieux pour les tentatives suivantes avec le moteur allumé pour maintenir la tension du circuit 12 volts … Qu’à cela ne tienne, on sort le groupe électrogène qui lui aussi peine sévèrement à alimenter la gargantuesque imprimante. Il faudra persévérer avec insistance pour pouvoir imprimer deux fois, une par une, les deux faces du document. Pourquoi deux fois ? Parce que comme toujours avec les impressions recto-verso en deux phases, la première copie présente sur ses deux faces un sens de lecture tête bêche … Arrêtez de sourire comme ça, cela vous arrive à chaque fois à vous aussi 😉

L’histoire aurait pu être bien plus pénible si un aller(au portant) / retour(vent dans le pif) s’était imposé. Mais jamais à cours d’optimisme, nous décidons de ne pas descendre à terre à Montserrat, pour éviter les autorités justement, et de partir des potron-minet pour la Guadeloupe où les formalités sont à la mode française, c’est à dire limitée à une saisie déclarative sur un ordinateur dans une boutique de souvenir 😉 En ce qui concerne les papiers, nous gérerons le dossier ultérieurement, comme on dit dans l’administration.

Le contact avec l’administration présumée détentrice des documents, le bureau d’immigration de Nevis, est plutôt bon. Bien entendu, dans un premier temps – par défaut dirons nous – ils n’ont pas nos papiers mais la femme officier va jusqu’à nous demander nos arrêts dans l’île afin d’y retourner pendant sa pose déjeuner … Plutôt sympa non ? Ceci dit, c’est inutile, après sans doute une rapide inspection (ou rangement succinct), le graal est retrouvé et nous pouvons envisager un envoi par la poste.

Pendant ce laps de temps, nous arrivons à Deshaies en Guadeloupe … Et constatons que tous les bateaux américains au mouillage de Montserrat sont arrivés avant nous alors même que nous étions les premiers sortis de la baie … Nous ne sommes pas dépressifs, mais cela porte un coup à l’amour propre quand même … Heureusement, l’honneur est sauf, ils ont tous navigué voiles ET moteur sur ce bord de près. En d’autres mots, ils ont triché et sont donc déclassé !

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C’est l’un des équipages de ces bateaux que nous rencontrons en premier, des notre appontement, car nous sommes tous à la recherche de l’ordinateur dédié aux formalités … Il sera finalement découvert après un bon nombre d’aller-retour au fond d’une improbable boutique de vêtements souvenirs. Il est aussi compliqué pour un américain d’utiliser un clavier français, que l’inverse pour nous … alors la saisie prends du temps pour eux et le temps est mis à profit pour sympathiser avec Shelly et John de « Planet Waves ».

Plus tard, en soirée, nous avons le plaisir de retrouver devinez qui ?.. L’équipage de Kalisea qui nous avait quitté à Nevis pour faire un crochet par Antigua plutôt que Montserrat. En morte saison : mauvaise pioche semble-t-il.

Comme nous avons conviés nos américains à nous rejoindre en terrasse pour boire un verre, ils arrivent quelques minutes après accompagnés de Hanck que nous découvrons et qui tentera de contacter un ami « en retard » sur la route vers le sud et qui devrait encore être à Nevis … Peine perdue, l’ami en question arrive le surlendemain, sans nos papiers … mais avec le « zika » ! Pourtant, ils sont passés à l’immigration, mais leur destination était Montserrat, pas la Guadeloupe …

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Du côté de l’administration de Nevis, les pourparlers va bon train, elle demande à chaque bateau de passage s’ils sont sur la route de Deshaies car un envoi par la poste semble être hors procédure … Nous allons bien finir par avoir un peu de chance sacreubleu !

Et puis un jour, genre lendemain encore, un couple inconnu nous aborde en annexe au son de « c’est vous qui avez oublié vos papiers à Nevis ? » … Sur le moment, ma seule réflexions est « mais tous le mouillage est au courant ou bien ? ». En fait, Regina et Mathias sont allemands, n’ont aucun lien avec le groupe d’américains, mais ils ont eux aussi un ami « en retard » qui viens juste de les prévenir qu’il arriverai quelque jours plus tard avec les papiers d’un bateau français ! Victoire et café de bienvenue, il ne nous reste plus qu’à patienter quelques jours que Christophe et Roswitha sur « Scout » nous rejoignent.

De ces jours d’attente, nous profitons pour suivre Kalisea une ultime soirée en baie de Malendure où le capitaine prépare sont niveau 1 de plongée. Je suis bien content d’avoir fait ce trajet supplémentaire plutôt que de succomber à l’envie de « feignasser » au mouillage. Je me disais bien qu’il serait compliqué de croiser leur route de nouveau … Bon vent Kalisea, nous avons adoré partager ces moments avec vous et espérons vous revoir bientôt 😉

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Les adieux (et un peu de rhum) consommés, nous retournons patienter à Deshaies où nous avons une « vie sociale » inédite au mouillage … Shelly et John organisant un apéritif dînatoire où la presque totalité des américains du mouillage sont présents, cela nous fait rencontrer du monde en plus des allemands avec lesquels nous partageons le « tea time » …

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Shelly et John en sont à leur second voyage dans les Caraïbes, le premier datant du début des années 70. Nous les soupçonnons d’avoir été en leur temps des « hippies de la mer » … Et de l’être restés encore un peu 😉 ils sont de bons conseils, nous fournissent des informations précieuses sur les « Intracoastal Waterways » américaine que nous hésitons à emprunter l’année prochaine et rêvent de rejoindre l’Europe et la Méditerranée dans un avenir pas si lointains … Ils y seront les bienvenus 😉

Regina et Mathias ont, pour leur part, traversés cette année depuis la hollande avec un … 32 pied (10 mètres quoi) … Respect ! Le bateau est fort bien préparé et donne malgré sa taille un sentiment de sécurité qui me porte à croire que moi aussi je pourrais envisager une traversée à moins de 12 mètres … mais je dois contrôler encore un ou deux petits détails portant sur le confort avant de nous lancer …

C’est un jour où ils nous ont demandés de garder un œil sur le bateau au mouillage que prends place l’aventure suivante. Alors que Manue surveille d’un discret coup d’œil l’embarcation teutonne par un bon vent de près de 30 nœuds, qu’elle voit un voilier parti à la dérive emportant bouée et chaîne éviter l’esquif ami pour percuter un gigantesque catamaran de 18 mètres.
Ni une, ni deux, il est temps pour nous de « rembourser » à la communauté le sauvetage de « Takoumi » à Syracuse (pour ceux qui suivent).
Manuela entreprend de prévenir les autorités, en fait, elle cherche à joindre un bateau plus proche dans le mouillage mais personne ne lui répond. Toutefois, le temps de préparer l’annexe et de me lancer à travers la baie, deux autres annexes sont déjà sur zone et commencent à manœuvrer tant bien que mal le voilier fou qui semble dépourvu de ligne de mouillage …
Comme je monte à bords, les rafales de vent retournent l’annexe et son moteur, mais comme j’en ai déjà parlé, cela n’est plus pour nous et depuis longtemps qu’une simple péripétie et certainement pas une catastrophe. Les co-sauveteurs avouerons plus tard avoir été (entre autres choses moins glorieuses) assez intrigués de me voir ne consacrer qu’un temps limité et aucun énervement au retournement de mon propre canot 😉
Une fois monté à bord, j’entreprends de libérer la bouée inutile et de trouver de quoi organiser un mouillage forain sinon solide, au moins suffisant. Mais la tâche est longue et assez peu couronnée de succès.
La pression monte d’un (ou deux) cran(s) quand les co-sauveteurs décident de jeter le bateau sur les rochers pour l’empêcher de dériver … Là, désolé, mais je ne comprends toujours pas comment on peut avoir une idée pareille … Et surtout, comment la justifier … À mon avis, il vaut mieux garder son cul dans un transat et boire un planteur en assistant au spectacle plutôt que d’entreprendre cette gabegie…
Toujours est-il qu’à 1 minute des rocher j’annonce avoir un mouillage … C’est un peu faux je doit l’admettre, l’ancre extirpée de la baille a mouillage ne peut pas être fixée sur la chaîne qui pour sa part ne peut être détachée de la bouée …
Qu’à cela ne tienne, mon mensonge ne m’a fait gagner qu’une minute et heureusement encore que la femme à la barre l’ait entendu. A moins de dix mètres des rochers ou le bateau se dirige encore sur son ère, je « balance » tout ce que j’ai trouvé de chaîne, je le rappelle sans ancre, pour convaincre que la situation est sous contrôle… Certainement le grand coup de chance de la manœuvre, la chaîne simple suffit à arrêter in-extremis la folle course aux rochers du voilier en perdition qui, pour le coup, ne l’est plus … en perdition.
La situation stabilisée, mes acolytes me prêtent enfin main forte pour compléter le mouillage de fortune en allant poser plus loin deux ancres attachées à des bouts d’amarrage… C’est tellement plus simple quand on prends son temps et qu’on ne panique pas … On arrive même à sortir DEUX ancres d’un bateau présumé à tort comme dépourvu de mouillage…
Comme il se doit, les évènements de la journée, comme beaucoup d’autres choses, sont commentés à bord du grand catamaran dont les propriétaires, Malou et Dominique, ont participé. « Oh peuchère » c’est immense un catamaran de 18 mètres, le carré n’est plus un carré, c’est un loft avec dépendances … Si ce n’est les conditions d’entretiens, je pourrai me laisser tenter par tant d’espace et de confort. Heureusement, je ne développe aucun sentiment de jalousie tellement l’aspect et le design extérieur de ce grand cata-ketch est … comment dire … curieux 😉 hihihi.

C’est le surlendemain que nous partons pour notre ultime navigation jusqu’à la marina de Riviere-sens où nous prendrons nos quartiers d’été pour préparer le bateau a passer une bonne période cyclonique … sans nous, qui prenons des vacances en métropoles.

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L’affaire de l’annexe

L’annexe, c’est l’affreux morceau de plastique gonflable et généralement motorisé qui permet de rejoindre la terre ferme (ou un bateau copain) depuis un mouillage forain … Et en terme d’affaire, la notre n’en est pas une tellement elle se révèle mal adaptée à notre usage.

À notre corps défendant, nous la savions « légère » pour notre projet de voyage, mais elle équipait le bateau quand nous l’avions acheté et nous préférions « finir celle la » avant d’investir dans une neuve. En plus, j’avais toujours cru que l’évidente mauvaise qualité de l’objet nous épargnerait de la conserver trop longtemps …

… C’était sans compter sur l’improbable opiniâtreté de l’objet à ne pas disparaître de la surface des océans.

Voilà un an donc que nous traînons notre « honte en PVC ». L’outil est tellement méprisable que les bateaux copains prennent désormais souvent la peine de nous proposer de venir nous chercher pour une balade à terre ou un simple apéro à bord … c’est pour dire … Et entre St-Martin et Deshaies, l’affaire a pris des dimensions tout à fait hors des limites acceptables.

Alors, bien sûr, quelques rustines fleurissent ici et là, témoins d’un usage souvent peu respectueux du niveau de résistance du PVC entrée de gamme. Ce fut le cas à Tenerrife (Canaries), au Marin (Martinique) et Prickly Bay (Grenade). Mais cela est, je dirais, un bricolage aussi rapide et gratifiant que commun au point d’être négligeable. Non, le problème, tout comme la vérité, est ailleurs.

Par nature déjà, exploitant sans vergogne les défauts de ses qualités, l’engin présente un très très net déficit de poids ?!?! Bien trop légère pour être stable, un vent un poil plus soutenu qu’un filet d’air suffit à la retourner quand le moteur est à poste. Ainsi, ce dernier a à ce jour, subit quatre (oui, quatre) bains d’eau de mer… Qui à chaque fois nous imposent une demi journée de labeur pour le sauver … Rinçage a l’eau douce, nettoyage (voir échange) de la bougie, purge du carburateur, quatre vidanges successives et d’innombrables (à s’en faire mal) tentatives infructueuses de tirer sur la ficelle de démarrage avant qu’il n’accepte enfin de donner de la voix, d’abord timidement, puis presque normalement pour enfin n’avoir plus que quelques étouffements les deux ou trois jours suivants … Il est parfois long de traverser un mouillage au ralenti, mais c’est plus agaçant que limitant finalement.

La première fois, avait eu lieu à Bequia. A l’issue d’une sortie de plage bien mal organisée, une vague pourtant pas plus haute qu’une taupinière avait retourné comme un fétu de paille embarcation, moteur, sac étanche et votre serviteur. Hormis, la séance mécanique, pas de conséquences autres que d’entrer trempé dans un bar de plage et de devoir faire sécher les billets avant de payer.

La seconde séance sous marine était déjà plus traitre. Alors que j’effectue les formalités de sortie de Carriacou et que Manue surveille nos affaires en terrasse du bar voisin, un client surgit demandant à qui veux l’entendre qui est le propriétaire de l’annexe noire et RETOURNEE, attachée au ponton des annexes ? Cette fois-ci, il s’agissait d’une amarre voisine qui s’était ignominieusement glissée par en dessous avant de se tendre et de balancer le frêle esquif comme on retourne une crêpe un soir de chandeleur.

Nous en arrivons à l’occurrence la plus méprisable du processus, à St-Martin, en baie de Marigot. Invités à rejoindre l’équipage de Kalisea à terre pour le déjeuner, nous repoussons crânement l’offre de venir nous chercher et préparons notre annexe. Une fois le rituel de mise à l’eau / montage moteur promptement mené à bien, nous détournons notre attention quelques secondes pour récupérer sacs et effets personnels. Ce faire quelques secondes de trop, mises immédiatement à profit par une rafale un poil plus forte que la précédente … Techniquement, mêmes causes, mêmes effets, mais en plus, nous devons surmonter le ridicule en rappelant les copains pour finalement accepter l’offre de transfert :-/
Une bonne chose tout de même, l’île de St-Martin est reconnue comme le plus haut lieu de « vol d’annexes » des Antilles … Et en ce qui concerne la notre, personne ne s’y est intéressé … Au moins une occasion où il est préférable de faire pitié qu’envie dirons nous.

Les retournements horizontaux ne sont pas les seules épreuves que nous traversons, à peine quelques jours plus tard, en baie du Colombier (Sr-Bart), nous décidons d’effectuer le trajet inter-bateau à la rame. Les mêmes amis qu’à Marigot sont inquiets de nous voir dériver hors de la baie au moment du retour … Évidement, ils ne peuvent pas savoir qu’une dame de nage vient de se décoller sur le trajet, nous obligeant à dériver une minute, le temps d’organiser et tester une nouvelle méthode de propulsion dissymétrique rame/pagaie …

Les mêmes sont encore témoins d’une ultime péripétie à Nevis, quand sur le départ, pour retourner à notre bord, la ficelle du lanceur du moteur choisit cet instant précis pour se couper et nous interdire toute velléité de démarrage. Cette fois-ci, nous sommes contraints d’emprunter une rame à nos hôtes.pour rejoindre notre bateau, la dame de nage n’ayant pas été recollée à temps, nous avons négligé d’emmener la rame qui ne devait pas nous servir ! Je crois que nos amis commencent à trouver « un peu » ridicule notre entêtement à nous embêter avec cette annexe, en tout cas, c’est ce que je commence à ressentir personnellement. Mais bon, comme on dit, chacun sa croix (ou devrais-je dire … éolienne ? 😉 )

Une dernière épreuve nous attend à Deshaies, où l’annexe se retourne lors du sauvetage (c’est une autre histoire, à venir) d’un bateau à la dérive. La stupéfaction des co-sauveteurs est palpable quant ils constatent avec quelle désinvolture blasée je traite ce qui pour nous est désormais un … non événement.

Alors, après tout ça, vous comprendrez, j’en suis sûr, si je vous avoue songer à abandonner cette annexe attachée à un poteau au bord de la route de notre « retour en vacance » ;-).

J’ajoute un petit mot pour nos amis d’Okeanos, qui ont sans doute compris avant nous, sans même avoir été témoins directs, les affres de la situation et qui ont été prompt à proposer systématiquement un petit transfert « sportif » en annexe 😉